Intermède

La vie, c’est cela aussi. Une colonie de cellules menant une existence fragile accrochée aux rares aspérités de la surface de la chose noire. Le temps se partage entre la lumière et la chaleur qu’il faut absorber au plus vite et l’obscurité et le froid qui figent tout ce qui vit. Chaque fois que la lumière est là, la colonie s’anime. Chacun se réchauffe, se gorge d’énergie juste pour assurer sa survie. La lumière ne reste jamais longtemps. Dès qu’elle disparaît, il faut se dépêcher. Il faut extraire du sol quelques molécules carbonées afin d’accumuler de la substance vitale, avant que le froid ne reprenne le dessus. Tous les 100 cycles de lumière environ, les cellules ont accumulé suffisamment de matériaux pour se diviser, doublant les chances de survie de la communauté. Mais il faut faire vite. Si la division n’est pas achevée quand revient le froid, il n’y aura plus de réveil. La substance vitale profitera aux voisins. Elle est bien trop rare pour être gaspillée.

Cela a toujours été ainsi, cela sera toujours ainsi. Du moins tant que reviendra la lumière, tant que la chose noire n’aura pas été totalement absorbée par la colonie.

Les cycles succèdent aux cycles, tous pareils, tous différents. La colonie se porte bien. Les individus semblent résister plus longtemps au froid, absorbant ainsi plus de matière à chaque cycle. La colonie s’étend maintenant sur une large portion de la chose noire. Pourtant, ce cycle-ci est différent des autres. Alors que la lumière vient de disparaître et que le froid prend sa place, la lumière revient brusquement. Mais pas la même lumière. La vraie lumière était douce, elle apportait la vie. Elle venait de loin. Elle était la Lumière, quoi! La nouvelle lumière, au contraire, sort directement de la chose noire. Elle ne nourrit pas. Elle fait mal. Elle n’est pas bonne pour la colonie. Les cellules ne sont pas faites pour s’en rendre compte. Elles absorbent la lumière, c’est tout. Cette lumière-ci les détruit. Lorsque reviendra la vraie lumière, la colonie ne sera plus là pour en profiter. Les chronos-propulseurs de l’Eclosionus l’auront pulvérisé. La vie, c’est cela aussi.

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