Un clin d’œil (bridé) sur la Chine

On m’aurait dit il y a seulement un mois qu’aujourd’hui je serai en Chine, j’aurais répondu : t’as fumé quoi ce matin ? Eh bien oui, ça y est : je suis à Beijing.

Je ne sais pas quelle image vous vous faites de cette ville. Est-ce la même que celle que je me faisais moi-même ?

Moi, j’avais en tête des images des monuments de la Chine impériale, de ceux du maoïsme triomphant ainsi que d’une multitude de petites échoppes le long de ruelles étroites. Sans oublier les larges avenues encombrées de cyclistes et de piétons en costume Mao.

Et bien Beijing, c’est bien en partie cela, mais je ne sais pas pour combien de temps encore. Plus personne ne porte de costume Mao, tout le monde est en jeans et T-shirt ou en complet cravate. Les cyclistes et les piétons risquent leur vie en se faufilant entre les voitures dans les embouteillages. Les avenues (disons plutôt les autoroutes urbaines), poussiéreuses et puantes du diésel des bus et camions, sont bordées de gratte-ciels ultramodernes (il y aussi de vieilles tours d’habitation, mais certaines sont sur le point d’être démolies). Les banques alternent avec les filiales de sociétés technologiques occidentales, les hôtels et les restaurants de luxe.

Tiens, d’ailleurs, c’est pas croyable le nombre de restaurants chinois qu’il y a dans le coin. Oh, il y a aussi quelques restaurants « normaux », tels que Mc Donald’s, Kentucky Fried Chicken, Pizza Truc-Chose. Les slogans révolutionnaires ont laissé la place à la publicité la plus tapageuse qu’il m’est arrivé de voir. Certaines étant entièrement en chinois, il m’est impossible de connaitre leur contenu. Les autres sont surprenantes. Plus de la moitié concernent des produits de haute technologie évoquant des détails techniques qui, chez nous, n’intéressent que les spécialistes. Sur la route de l’Aéroport, il y avait même une affiche pour Airbus et une autre pour les réacteurs d’avion Pratt et Whitney.

Bien sûr, dès que l’on s’aventure dans les petites rues, on découvre des échoppes vendant de tout sur 5 mètres carrés où quatre personnes attendent le client, scotchés devant la télévision, ainsi que des épiceries encore plus petites qui servent également de cabines téléphoniques. Mais à la vitesse où tout se développe ici, la quantité des chantiers en témoigne, toute cette population aura bientôt entièrement disparu, assimilé à la classe moyenne naissante pour les plus chanceux, chassés dans de lointaines banlieues crasseuses pour les autres.

Mais le communisme est encore bien présent. Même si les gens que j’ai rencontrés (de jeunes informaticiens essentiellement) ne jurent que par le capitalisme, les mentalités offrent encore une grande place pour la centralisation et un certain dirigisme. Sur la place Tien Anmen, en face de la cité interdite où trône le portrait de Mao, les policiers en uniformes (et probablement aussi en civil) sont bien présents, comme le panier à salade prêt à embarquer toute personne manifestant la moindre velléité de contestation.

Dans la campagne environnante, pour ce que j’ai pu en voir, l’agriculture est encore organisée en fermes collectives. Les maisons sont dans un état calamiteux. Pourtant, par-ci par-là, quelques chauffe-eaux solaires indiquent que les premiers rudiments de confort font leur apparition en ces lieux. Plus au nord, dans les montagnes près de la grande muraille, on peut voir, encore préservés, quelques villages de la Chine traditionnelle.


Ce texte a été écrit à Beijing le dimanche 14 mai 2000.

 

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