Revenu de Base Inconditionnel : quid des enfants ?

Bien qu’aucun montant n’est spécifié dans l’article constitutionnel proposé pour l’introduction d’un Revenu de Base Inconditionnel (RBI), il est souvent avancé un montant fixe (par ex. CHF 2500.- par mois) pour chaque personne majeure résidant légalement en Suisse. Pour les mineurs, plusieurs idées ont été proposées :

  • La moitié du montant attribué à une personne majeure.
  • Le quart du montant attribué à une personne majeure.
  • Un montant échelonné selon l’âge.

Parmi les opposants au RBI, certains ont évoqué un argument assez particulier que l’on pourrait résumer ainsi: en admettant pour les mineurs un montant égal au quart de celui d’un adulte, soit CHF 625.- par mois durant 18 ans, l’enfant se trouverait à sa majorité avec un joli pactole de CHF 135’000.-. La tentation serait alors grande pour le jeune adulte de dilapider cette somme tombée du ciel.

Ainsi, du point de vue de ces opposants, ce revenu appartiendrait à l’enfant et ne pourrait qu’être accumulé jusqu’à la majorité de son propriétaire. À mon avis, cela correspondrait avec une vision capitaliste de la société. De ce point de vue, attribuer à un enfant un tel revenu dont il ne pourra jouir qu’à sa majorité est une absurdité, d’autant plus que les frais lié à l’entretien et à l’éducation de l’enfant seraient toujours à la charge des parents, forçant ceux-ci à devoir travailler, car leur revenu de base serait alors insuffisant pour subvenir à leurs propres besoins minimaux.

Cette idée d’accumulation du revenu de base des enfants est assez étrange et n’est mentionnée que par quelques opposants. Il y a un consensus parmi les promoteurs du revenu de base pour que les montants attribués aux enfants soient confiés à leurs parents afin que ceux-ci subviennent aux besoins de leurs rejetons adorés. Le risque que des parents indignes détournent ces montants à leur propre profit ne peut être exclu, mais il existe déjà concernant les allocations pour enfants allouées dans le système actuel.

Toutefois, l’argumentation de ces opposants a le mérite de braquer les projecteurs sur les problèmes potentiels posés par un revenu de base attribué aux mineurs. Voici les deux principaux :
1) Le basculement, à 18 ans, d’un montant versé aux parents vers un vrai revenu versé au jeune adulte peut effectivement comporter un certain risque de dilapidation de ce revenu, du moins dans un premier temps.
2) L’attribution d’un montant important, en pratique aux parents, dès la naissance de leurs enfants, constitue une incitation forte à la natalité. La pertinence d’une telle incitation est un autre débat qui ne sera pas entamé dans cet article.

Le modèle d’attribution d’un Revenu de Base adapté au mineurs pourrait être défini par les quelques principes simples suivants, suivis de graphiques pour clarifier le concept :

1) L’allocation attribuée à un enfant est proportionnelle à son âge, débutant par une somme minimale qui devient égale, à la majorité, au revenu de base d’un adulte.
2) La somme initiale, versée dès la naissance, est définie en fonction de la volonté d’incitation à la natalité. Un montant élevé incitant à la natalité, un montant faible freinant la natalité.
2) Au départ, le montant est entièrement confié aux parents afin de subvenir aux besoins de l’enfant.
3) À partir d’un certain âge, une part de plus en plus importante du montant n’est plus confiée aux parents, mais directement à l’enfant. D’abord symbolique, correspondant à un simple argent de poche, cette somme devient progressivement un vrai revenu, accompagnant le mineur au cours de son évolution vers le statut d’adulte responsable. La part confiée aux parents se réduit en conséquence tout aussi progressivement, pour s’annuler à la majorité de l’enfant.
4) Bien sûr, tout en restant dans le cadre de la législation sur le travail, l’enfant peut, s’il le désire, se procurer un revenu supplémentaire en pratiquant une activité rémunérée.

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Sur le graphique, la variation des montants est linéaire, pour simplifier la compréhension du concept. En pratique, on devrait adopter des courbes plus complexes afin de tenir comptes des besoins réels en fonction du développement de l’enfant, des frais liés à la scolarité, au logement, aux vêtements, à la nourriture, etc.

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Ce modèle aurait les avantages suivants :

  • La couverture des besoins minimums des enfants est progressivement assurée.
  • L’enfant prend en charge progressivement la responsabilité de son revenu de base, lui permettant d’assumer ses dépenses essentielles, évitant le risque de dilapidation qui pourrait résulter d’une augmentation brutale du revenu. Au contraire, alors qu’il voit son revenu augmenter tout au long de son adolescence, ce revenu plafonne lorsque l’enfant atteint l’age de 18 ans. Pour continuer à bénéficier d’un revenu en augmentation, celui-ci sera naturellement incité à s’engager dans une activité rémunérée.
  • On obtient un levier utile pour la politique relative à la natalité, soit pour la favoriser, soit pour la freiner.
  • L’avantage majeur de ce modèle est qu’il est finalement très proche de la pratique actuelle.

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